Le nouveau règlement sur l’écoconception des produits durables (Ecodesign for Sustainable Products Regulation) vient d’entrer en vigueur. Cette réglementation européenne vise à renforcer la circularité des produits, pour ainsi les rendre plus durables et respectueux de l’environnement. Cela vient renforcer la réglementation existante en matière d’écoconception, mais aussi élargir le champ d’application à presque toutes les catégories de produits sur le marché européen.
Le règlement sur l’écoconception pour des produits durables
Le règlement sur l’écoconception des produits durables a été validé par le Parlement européen le 23 avril 2024, puis publié au Journal officiel de l’Union européenne du 28 juin 2024. Il vient remplacer l’actuelle directive 2009/125/CE du Parlement européen et du Conseil sur l’écoconception, mais aussi modifier la directive 2020/1828 tout comme le règlement 2023/1543.
Ce nouveau règlement européen pose un cadre législatif afin de fixer un large éventail d’exigences en matière d’écoconception, dans le but d’améliorer la circularité et la performance environnementale des produits. Ces exigences portent à la fois sur des conditions de performance et d’information.
Jusqu’alors, les fabricants européens étaient déjà soumis à des exigences en matière d’écoconception applicables aux produits liés à l’énergie, comme les réfrigérateurs, les appareils de chauffage, les ordinateurs ou encore les aspirateurs. Cette nouvelle réglementation concerne désormais la quasi-totalité des biens physiques commercialisés au sein de l’Union européenne, à quelques exceptions près (produits d’alimentation, voitures, produits liés à la défense ou la sécurité nationale…).
Ebba Busch, ministre suédoise de l’Énergie et de l’Industrie et vice-première ministre, souligne l’importance de cette démarche : « Si nous voulons des produits européens réellement durables sur le marché, nous devons aborder cette question à sa source : la conception. Le règlement sur l’écoconception garantira que les produits vendus sur le marché de l’UE sont prêts pour la transition écologique. »
De nouvelles exigences d’écoconception
Le cadre législatif posé par ce nouveau règlement sur l’écoconception prévoit de nouvelles exigences, dans plusieurs domaines.
La durabilité et la réparabilité
Les produits devront être conçus de façon à maximiser leur durée d’utilisation et, lorsque c’est possible, à dépasser la durée de vie généralement observée au sein des mêmes groupes de produits, dans le but de minimiser le besoin de les remplacer. La conception devra faciliter le démontage et la réparation. Cela implique notamment que les composants et sous-ensembles soient accessibles pour être aisément réparés ou remplacés lorsque nécessaire.
Les substances préjudiciables
Les fabricants devront limiter, voir exclure, l’utilisation de matériaux et/ou de substances préoccupantes pouvant entraver leur réutilisation ou leur recyclage, ou encore étant tout simplement nocifs pour l’environnement.
L’efficacité énergétique et l’utilisation des ressources
Les produits devront être conçus de façon à optimiser la consommation d’énergie et l’utilisation des ressources, et ce, tout au long de leur cycle de vie.
L’utilisation de matériaux recyclés
Un seuil minimal de matériaux recyclés devra être intégré dans la fabrication des produits afin de favoriser l’utilisation de ressources secondaires et ainsi dynamiser l’économie circulaire.
Le « remanufacturage » et le recyclage
Les fabricants devront faciliter le démontage et la séparation des composants de leurs produits afin de favoriser le « remanufacturage », mais aussi le recyclage de qualité via la récupération des matériaux lorsque les biens arrivent en fin de vie.
L’empreinte environnementale
Les choix quant aux matériaux, aux procédés de fabrication et à la chaîne logistique devront être le reflet de la volonté des fabricants à réduire les émissions de gaz à effet de serre et l’empreinte carbone de leurs produits.
Les produits de consommation invendus
Il sera interdit pour les grandes entreprises, puis pour les entreprises de taille moyenne de détruire les textiles et les chaussures invendus. Ces structures devront également publier sur leur site e-commerce des informations annuelles quant à leurs produits invendus, et ce pour tous les secteurs d’activité.
Les marchés publics écologiques
Plusieurs critères obligatoires seront applicables à la passation de marchés publics afin d’utiliser les dépenses publiques comme levier pour stimuler la demande de produits plus durables.
L’information des acheteurs et consommateurs
Les fabricants devront fournir des informations précises et accessibles sur la circularité de leurs produits. Cela concernera autant la durabilité que la réparabilité, l’utilisation de matériaux recyclés, etc.
Dans cette dynamique, il est préconisé de communiquer ces informations sous un format numérique, comme à travers le « passeport numérique de produit ». Ce système prendra la forme d’une fiche d’identité accessible par voie électronique (type notice, QR code…) pour les produits, mais aussi les composants et les matériaux. Cela permettra ainsi à toutes les parties prenantes (consommateurs, entreprises, fabricants, autorités…) de prendre des décisions éclairées.
Les prochaines étapes de cette réglementation
Le règlement pour l’écoconception des produits durables est entré en vigueur le 18 juillet 2024. Aujourd’hui, tout l’enjeu est de le mettre en œuvre en garantissant un niveau élevé de transparence et une approche inclusive.
L’ambition est d’adopter et de publier un premier plan de travail d’ici avril 2025. Au fil du temps, des actes délégués seront progressivement pris afin de fixer ces exigences pour chaque produit, ou pour des groupes de produits aux caractéristiques similaires. À savoir que la Commission européenne devrait prioriser les produits considérés comme ayant un impact élevé tels que les métaux, les produits chimiques, les produits électroniques, les meubles…
Cette démarche s’inscrit pleinement dans le cadre du Pacte vert pour l’Europe et du Plan d’action en faveur de l’économie circulaire. Et toutes ces mesures devraient permettre à l’UE de doubler son taux de circularité dans l’utilisation des matériaux et d’atteindre ses objectifs en matière d’efficacité énergétique à horizon 2030. Et pour cause, la Commission européenne souligne que «â¯d’ici à 2030, le nouveau cadre pour les produits durables peut permettre d’économiser 132 millions de tonnes d’énergie primaire, ce qui correspond environ à 150 milliards de mètres cubes de gaz naturel, soit presque l’équivalent des importations de gaz russe de l’Union européenne⯻. À cela s’ajouterait la réduction des émissions de gaz à effet de serre de l’ordre de 260 millions de tonnes équivalent CO2 ainsi que la création de 200 000 emplois.
Vous l’avez compris, ce règlement est un grand pas en avant pour la transition écologique. Il appartient désormais aux entreprises d’agir de façon proactive pour en évaluer l’impact potentiel sur leurs produits. D’autant qu’elles peuvent contribuer aux échanges, en tant que parties prenantes, sur l’élaboration des critères d’écoconception et du passeport numérique de produit.