Pour les particuliers, la prise de conscience de la possibilité d’une action positive à travers ses achats est déjà un peu ancienne. Nous sommes habitués à interroger les conditions de fabrication et de transport des biens que nous convoitons. Un écosystème puissant et diversifié existe pour éclairer nos prises de décision.
Sur le terrain de l’achat professionnel, le phénomène comme stratégie pensée et structurée est plus récent. Il faut dire que pour constituer un véritable pilier de la stratégie RSE, les achats des entreprises doivent être transformés. Pour la fonction achats, cette transformation est évidemment loin d’être neutre. C’est la relation avec les fournisseurs qui doit être repensée en profondeur, avec le besoin de documenter précisément et de manière incontestable leur engagement et leurs résultats. Pour bénéficier du crédit conféré par une démarche RSE exemplaire, les entreprises ont à tracer l’ensemble de la chaîne de valeur.
Le site communautaire Procurement Leaders donne quatre bonnes raisons d’accomplir cet effort. En précisant que l’impératif stratégique de systématiser les achats responsables ne peut être envisagé qu’à deux conditions : réduire le panel de fournisseurs et recourir aux ressources digitales.
Les règles sont de plus en plus contraignantes
Le jeu se durcit chaque année sous l’effet de l’accumulation de législations. Si les 10 principes du Global Compact[1] ne s’imposent qu’aux organisations qui en signent la charte, des règles beaucoup plus impératives ont fleuri sur chacun des continents. La loi fédérale américaine punissant la corruption d’agents publics à l’étranger (US Foreign Corrupt Practices Act), le règlement européen fixant les obligations en matière de RSE (EU CSR Reporting Duty) ou la loi française imposant un devoir de vigilance aux multinationales (devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre) sont trois exemples du maillage serré qui encadre les comportements des sociétés dans le monde.
Ces régulations ont en commun d’étendre la responsabilité des grands donneurs d’ordres à leurs fournisseurs et sous-traitants.
Les consommateurs finaux sont de plus en plus vigilants
Une usine qui ne respecte pas les règles élémentaires du droit humain dans un pays étranger, un sous-traitant peu regardant sur le respect de l’environnement et c’est toute l’entreprise dont la réputation est mise à mal. Aujourd’hui, un écart de conduite d’un des éléments de la chaîne de valeur, répercuté sur les réseaux sociaux, induit un rejet immédiat de la part des consommateurs. Acheter responsable et pouvoir le prouver contribuent à la valeur de la marque et à la préférence des clients finaux potentiels.
Choisir un panel réduit de fournisseurs respectueux est économique
La méthode traditionnelle d’audit de ses fournisseurs est consommatrice de trop de ressources pour évaluer correctement des milliers de fournisseurs sur la base des nombreux indicateurs RSE. Cette évaluation n’est pas à la portée des petites et moyennes entreprises. Il ne reste aux organisations attentives à leur réputation et engagées dans les achats responsables qu’à sélectionner un petit nombre de partenaires partageant les mêmes valeurs. Sous peine de prendre un risque trop élevé d’introduire dans leur chaîne de valeur des produits ou des services entachés par des comportements non respectueux.
La technologie est efficace pour renforcer la solidité de la chaîne RSE
La digitalisation de la chaîne d’approvisionnement donne les moyens de systématiser la détection de comportements non-conformes par rapport à l’éthique des affaires, le respect des droits humains ou la préservation de l’environnement. L’identification des risques associés à chaque fournisseur permet aux entreprises de prendre rapidement les décisions qui s’imposent pour écarter les acteurs les moins scrupuleux. À l’inverse, la même technologie appliquée aux fournisseurs les plus engagés renforce les liens de proximité au sein de l’écosystème. Les valeurs partagées et la cohérence des comportements doivent véritablement inspirer l’action des acheteurs.
La catégorie RSE des 11èmes Trophées Décision Achats illustre le fait que toutes les formes d’organisations sont impliquées dans la construction d’une stratégie d’achats durables. Collectivités, entreprises de services et entreprises industrielles ont chacune leur petite révolution à accomplir. Mais qui ne signerait pas pour une stratégie durable dans un environnement si incertain !
[1] Le Global Compact des Nations Unies est la plus importante initiative internationale d’engagement volontaire en matière de développement durable, regroupant plus de 12.000 participants dans 170 pays