Inflation sous-jacente : comment utiliser cet indicateur clé pour vos achats ?

13 février 2025

L’inflation impacte immanquablement l’activité des entreprises. Cela entraîne une hausse des coûts d’achat et de production, et accroît les risques de perturbation de la chaîne d’approvisionnement. Les entreprises doivent surveiller le marché pour s’en protéger et préserver leur rentabilité. Pour s’orienter, elles peuvent s’appuyer sur un indicateur clé : l’inflation sous-jacente. Cet indice a la particularité d’exclure les prix qui sont particulièrement volatils comme l’énergie, l’alimentation fraîche et les prix administrés, afin de dégager une tendance de fond dans l’évolution des prix.

Qu’est-ce que l’inflation sous-jacente ?

Parmi les différentes mesures de la variation des prix figure un indicateur plébiscité par les banques centrales et les économistes : l’inflation sous-jacente. Cet indice exclut les prix qui sont soumis à l’intervention des gouvernements (électricité, gaz, tabac…), mais aussi les produits dont les prix sont particulièrement volatils (produits frais, viandes, produits laitiers, fleurs et plantes, produits pétroliers…), car ils subissent des mouvements variables liés aux facteurs climatiques et/ou aux tensions de marché. On calcule le taux d’inflation sous-jacente comme le glissement des indices de prix sous-jacents sur douze mois, en excluant les prix encadrés et volatils susnommés.

C’est donc un indice désaisonnalisé et non impacté par les politiques gouvernementales, qui permet de dégager une tendance de fond de l’évolution des prix dans un pays ou même dans une zone géographique. C’est ce qu’explique Philippe Martin, économiste de premier plan : « L’idée qui sous-tend l’inflation sous-jacente est d’estimer les tensions structurelles sur les prix, ce qui tient à la dynamique intrinsèque de la demande, aux tensions sur les chaînes de valeurs ou encore à la boucle prix - salaires, en excluant le prix des produits et services les plus volatils. »

Si l’inflation sous-jacente est suivie de près, c’est parce qu’elle est jugée plus représentative que l’inflation globale. C’est d’ailleurs la trajectoire de cet indice qui régit la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE). Christine Lagarde, Présidente de la Banque centrale européenne, ajoute : « L’inflation sous-jacente fait référence à la partie lente de l’inflation qui, lorsque les chocs temporaires se sont estompés, persistera à moyen terme. »

Inflation : quels leviers doit activer la fonction achats ?

Dans un contexte inflationniste, les directions des achats ont un impératif : mettre les coûts sous contrôle, tout en garantissant la qualité et la continuité des approvisionnements pour leur entreprise. Heureusement, il existe des bonnes pratiques à la disposition des acheteurs pour limiter les impacts de l’inflation.

Anticiper les évolutions du marché

Pour lutter contre l’inflation, il faut d’abord anticiper l’évolution du marché et les besoins à venir. Les acheteurs peuvent suivre l’inflation sous-jacente pour avoir une tendance globale, mais ils doivent également observer les tendances de prix par catégories, les risques de pénurie, les contraintes subies par les fournisseurs et même les opportunités de marché.

C’est ainsi qu’ils pourront identifier les domaines d’activité les plus à risques et activer les bonnes stratégies suffisamment en avance : contractualisation sur le long terme, constitution de stocks tampons, recherche de nouvelles alternatives… Cela implique notamment de disposer d’outils de suivi et d’analyse prédictive capables de sonder la data externe.

Négocier avec ses fournisseurs

Pour faire face à l’inflation, il est également indispensable d’ouvrir la discussion avec ses fournisseurs. Il s’agit de comprendre leur situation et leurs intentions, mais aussi d’obtenir des conditions favorables, des remises ou encore des garanties de prix. D’autant que les fournisseurs essaieront probablement de répercuter la hausse des coûts sur leurs clients.

Alexandre Billard, directeur achats de Lumibird, témoigne à ce sujet : « Les relations se tendent aujourd’hui, car dans de nombreux cas, les hausses de prix réclamées, voire imposées, par certains fournisseurs et présentées comme étant dues à des hausses de prix matières ou des pénuries sont désormais infondées. » Il s’agit alors de s’assurer du bien-fondé de cette démarche et de trouver des solutions conjointes.

Dans cette démarche, il est important de bien connaître la structure des coûts de ses fournisseurs, mais aussi de se référer aux indices du marché. À nouveau, l’inflation sous-jacente donne une tendance globale, qu’il convient de compléter avec des indices de référence dédiés aux matières premières, à l’énergie, à la main-d’œuvre. C’est ainsi que les acheteurs pourront comparer l’évolution des prix de leurs fournisseurs avec ceux du marché et ajuster les éventuels écarts.

Diversifier ses sources d’approvisionnement

Pour maîtriser les effets de l’inflation, les entreprises ont aussi tout intérêt à diversifier leurs sources d’approvisionnement. C’est ce qu’on appelle le dual sourcing ou encore le multiple sourcing. Cela leur permet de réduire leurs risques fournisseurs : dépendance économique, rupture ou retard d’approvisionnement, non-respect des contrats…

Il s’agit alors de chercher de nouveaux fournisseurs qui soient compétitifs, fiables et de qualité. Cela nécessite une surveillance constante du marché afin d’identifier les bons partenaires, dont l’offre de produits et/ou de services peut se substituer à celle existante. Malgré la pression des prix, il est important de ne pas se focaliser uniquement sur cet élément, mais bien d’évaluer ses prochains partenaires sur la base de critères pertinents et objectifs, comme la flexibilité, la durabilité, l’innovation, etc.

Optimiser les processus

Enfin, les directions des achats peuvent aussi s’attacher à optimiser leurs processus. C’est en rationalisant, en automatisant et en simplifiant l’ensemble de leurs processus qu’elles parviendront à réduire leurs coûts indirects.

Parmi les leviers à disposition des acheteurs se trouve la rationalisation du portefeuille fournisseurs. En massifiant les achats, cela réduit les coûts de gestion fournisseurs, mais aussi les coûts transactions. D’autant que c’est aussi un levier pour réaliser des économies d’échelle et négocier des prix sur volume. Un autre levier efficace est la digitalisation des transactions via une solution e-procurement. Cette démarche permet de réaliser jusqu’à 80 % d’économies par transaction. Sans compter que cela offre aux acheteurs une vision claire de leurs dépenses et que cela s’inscrit dans une démarche environnementale.

Vous l’avez compris, l’inflation sous-jacente est une mesure stable et cohérente des variations de prix qui est moins impactée par les phénomènes exogènes. En excluant les composantes volatiles, elle offre une vision claire des tendances économiques à moyen terme. Cet indice permet aux entreprises de bien comprendre la tendance inflationniste et de prendre des décisions éclairées. Les directions des achats sont ainsi en mesure de maîtriser leurs coûts, de réduire les risques et de maintenir de bonnes relations avec leurs fournisseurs.