Début mai, nous avons organisé une « conférence-débat » sur les achats à Rotterdam, aux Pays-Bas. Lors de cet événement, la directrice des achats de l'une des plus importantes entreprises de construction néerlandaises a pris un malin plaisir à montrer la vidéo humoristique « Quand je serai grand, je travaillerai aux achats ! ». « Nous devons arrêter de toujours endosser le rôle de Calimero » a-t-elle ajouté avec ardeur. Nous sommes bien d’accord, il est temps de mettre les achats sur le devant de la scène.
Notre intervenant, le Professeur Dr. Arjan van Weele a fait le constat suivant : « Grâce à la technologie, les consommateurs ont aujourd'hui la possibilité d'obtenir facilement, efficacement et rapidement tout ce qu'ils désirent alors pourquoi, malgré toutes ces nouvelles technologies, en tant qu'employés, devons-nous toujours et encore faire face à des expériences clients internes souvent catastrophiques ? » Sa réponse ? « Dans la plupart des organisations, seul 1 % des effectifs gère 70 % des coûts. En considérant cette seule statistique, on a le sentiment qu'il est temps pour les services achats de monter au créneau. De plus, 75% des organisations accusent encore un retard en matière de digitalisation des achats »
Achats : « L'ultime frontière »
Une amélioration des achats de seulement quelques points permet de doubler les bénéfices de la plupart des organisations et créer de bien meilleures expériences pour les clients internes. Malgré cela, les différents services n'ont souvent que peu de considération pour les professionnels des achats surtout lorsqu’il s’agit des achats indirects.
Peu de personnes sont mobilisées au sein des services achats et on attend un ROI immédiat. Aussi la méthode la plus couramment utilisée à l'égard des fournisseurs reste souvent celle du presse-citron. Tout le monde sait qu'un citron peut être pressé une fois, peut-être deux, mais c'est à peu près tout.
Pour sortir de ce cercle vicieux, les fournisseurs préfèrent parler de partenariat mais on les soupçonne vite de vouloir en vérité détourner la conversation de la question des prix !
Et pourtant ! Lorsqu'il ne s'agit pas d'achat de produits ou services stratégiques, le plus difficile n’est pas de négocier une remise mais de faire en sorte que le contrat signé soit utilisé par les utilisateurs internes et que l’ensemble des processus, de la prise de commande à la facturation, soit optimisé.
Aussi plus qu’un négociateur, l’acheteur doit être un expert en coopération et communication !
Communication et coopération : des compétences primordiales en matière d'achat ?
Au cours de cette table ronde, Le Professeur Dr. Arjan van Weele, a présenté une étude de cas portant sur un fournisseur international de produits et de solutions pour l'industrie du verre. Après avoir investi des millions dans une nouvelle plateforme d'achats électronique et un lancement plutôt réussi, les bénéfices prévus ont stagné dans l'année qui a suivi, tout comme l'utilisation de la plateforme.
La raison ? Les utilisateurs internes n'ont pas montré de véritable engouement pour le nouveau système. D'une part, toutes les parties prenantes en interne n'ont pas été suffisamment impliquées lors de la phase initiale du projet devant aboutir à la nouvelle plateforme. D'autre part, les collaborateurs n'ont pas vraiment pris conscience des avantages liés aux contrats des fournisseurs.
Le système a bougé à partir du moment où la bascule vers les nouveaux fournisseurs a été intégrée à leur prime !
Somme toute, cette étude de cas s'est montrée très révélatrice au cours de la table ronde. Les bonnes pratiques montrent que :
- 80% du temps est consacré à assurer l'utilisation effective d'un contrat fournisseur par le client interne (contre 20 % dédiés au choix du fournisseur et à la négociation du contrat).
- Il est essentiel de créer un intérêt commun avec le client interne en amont et d'associer étroitement le fournisseur à la solution en elle-même ainsi qu'à sa mise en œuvre.
- Le prix n'est pas le critère le plus important lors du choix du fournisseur. Toutefois, de nombreuses autres circonstances permettent d'agir véritablement selon le « coût total d’acquisition » (TCO).
Le fait d'influencer les dirigeants, de convaincre les utilisateurs internes et de forger un nouveau type d'alliance avec les fournisseurs exige une mise à niveau des services pour laquelle le développement des relations ainsi qu'une grande capacité de communication sont essentiels.
Blockchain, intelligence artificielle, informatique quantique, etc.
Selon Le Professeur Dr. Van Weele, l'heure est à l'acheteur 3.0 (sa version 2.0 n'étant déjà plus d'actualité) : celui qui sait que le fer de lance des achats allie déploiement de technologies et participation active des intervenants (équipes de direction, utilisateurs internes et fournisseurs). Bien entendu, cela exige également que les fournisseurs sortent de leur « zone de confort » (même si je préfère l'appeler la « zone d'inconfort », car pour moi il n'est pas très agréable d'être constamment sous pression). Ils doivent également se positionner en tant que partenaires et spécialistes.
Et pour finir sur une note positive : l'un des invités à la table ronde (qui travaille pour l'une des plus célèbres agences de recrutement internationales) constate un net changement au niveau des profils d’acheteurs recherchés par ses clients : ils sont passé progressivement de la volonté de recruter un expert en négociation à celle d’un expert en TCO.
« Acheteur 3.0 : me voici ! »