La transformation digitale de la fonction achats est en œuvre. Un récent dossier consacré, par la revue Excellence HA, à cette thématique de la digitalisation des achats en apporte de nouvelles illustrations.
Néanmoins, comme le démontre le dossier, deux insuffisances existent dans la transformation digitale de la fonction achats. Ces deux points bloquants sont :
- L’absence d’une stratégie digitale claire pour la fonction achats [1]
- La pénurie de talents capables de relever les enjeux stratégiques de la transformation digitale à l’échelle de la fonction achats [1]
Pour accompagner la fonction achats sur le chemin d’une transformation digitale aboutie, le dossier propose de distinguer deux approches, et montre combien la seconde approche doit compléter la première :
Transformation digitale de la fonction achats : le digital « in the business »
Cette première approche de la digitalisation de la fonction achats a pour finalité de développer l’agilité de l’organisation. Le propos est ici de digitaliser chacun des processus achats pour améliorer l’efficacité de chaque étape et l’efficience de l’ensemble.
Améliorer l’efficience globale de la fonction achats
Grâce à la digitalisation des processus, les entreprises les plus performantes limitent à 1 % du montant total des achats, le coût de fonctionnement de la fonction achats [2]. Certains experts annoncent même que la transformation digitale est susceptible de diviser ce taux par deux [3].
Automatiser chacun des processus de la fonction achats
Plusieurs générations technologiques se sont succédé depuis les années 1980 pour repousser toujours plus loin les limites de la transformation digitale de la fonction achats :
- L’Échange de Données Informatisé (EDI), qui supprime les phases de saisie.
- Les outils de e-sourcing et de e-procurement, qui agissent sur des processus isolés.
- Le Purchase-to-Pay, qui digitalise l’ensemble du parcours achats.
- Les applications de la blockchain en matière de traçabilité.
La dernière génération de technologies au service de la transformation digitale de la fonction achats commence seulement à être déployée dans les organisations les plus en avance. Ces technologies automatisent des interactions plus complexes des processus achats.
- Des chatbots prennent en charge l’assistance des clients internes.
- Des outils de RPA (Robotic Process Automation) mobilisent l’intelligence artificielle et le machine learning pour remplacer des acteurs humains sur des tâches répétitives.
Utiliser les gains de productivité pour développer la légitimité de la fonction achats
On arrive aujourd’hui au bout de la démarche, avec la capacité à digitaliser 100 % des tâches administratives, qui représentent en moyenne 50 à 70 % du temps des acheteurs.
Les Directeurs Achats ont le choix :
- Se contenter de ce résultat, le digital « in the business ».
- Investir les gains d’efficience dans le digital « as a business ».
Transformation digitale de la fonction achats : le digital « as a business »
Plus efficace, la fonction achats devient dans cette deuxième approche plus stratège grâce à la transformation digitale « as a business ».
En effet, des outils comme le big data, le data analytics ou l’intelligence artificielle sont mis à profit pour digitaliser le pilotage de la fonction achats.
Par ailleurs,, une veille intelligente systématise la détection des potentialités d’innovation à capter au profit de l’entreprise.
Mais surtout, l’approche « digital as a business » vise à doter la fonction achats de la capacité à être un véritable partenaire en révolution digitale pour l’entreprise. Ce qui suppose l’acquisition de deux savoir-faire clés :
- Savoir travailler avec les start-up.
- Savoir travailler avec les GAFA.
Savoir travailler avec les start-up
Les start-up ne répondent pas aux critères habituels de la fonction achats, par exemple en termes de taille, de lisibilité ou de sécurité. Pourtant, l’expertise de ces acteurs est souvent indispensable aux entreprises traditionnelles pour opérer elles-mêmes leur mue vers une promesse de valeur intelligente et connectée.
La fonction achats doit se donner les moyens humains (par exemple recruter dans la génération Z) et techniques (contrats, management) pour identifier et gérer les partenaires indispensables à ses clients internes.
Savoir travailler avec les GAFA
Les GAFA sont devenues les premières capitalisations boursières et des géants qui érodent la rentabilité de nombre d’entreprises traditionnelles autour du monde. Pour autant, leurs algorithmes, leur avance digitale (Cloud, hébergement) et leur compréhension des attentes des consommateurs d’aujourd’hui sont souvent incontournables pour les acteurs classiques.
Le Directeur Achats doit trouver les ressources pour configurer son équipe en fonction de ces enjeux complexes et déterminants pour la croissance et l’indépendance de son entreprise.
En conclusion, la transformation digitale de la fonction achats ne doit pas se limiter aux outils mais impliquer son fonctionnement intime. Les références, les pratiques, la composition des équipes ont à procéder à leur big bang pour que la fonction achats soit à la hauteur des défis assignés à ses clients internes.
Pour dire les choses autrement, pas de véritable transformation digitale de l’entreprise sans transformation digitale aboutie de la fonction achats !
La réussite de la transformation digitale de la fonction achats repose sur une révision des fondamentaux du métier. Pour prendre la mesure du défi qui attend les acheteurs dans les années qui viennent, lisez l’article de Pierre-Olivier Brial, Directeur Général Délégué de Manutan : Comment la fonction achats se réinvente à l’ère digitale ?
[1] Deloitte (2018), CPO Survey 2017 : le coût et l’impératif du digital
[2] Accenture (2015), Procurement’s Next Frontier :The Future Will Give Rise to an Organization of One
[3] Forrester (2016)