Négociation achats : les 10 bonnes pratiques de la Harvard Law School

Bonnes pratiques achats
Mis à jour le 18 novembre 2021
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La négociation achats a beaucoup à gagner à connaître et à appliquer les 10 bonnes pratiques qui structurent le programme de négociation de la Harvard Law School, centre de formation de réputation mondiale.

Transposer les bonnes pratiques au domaine de la négociation achats

La transposition à la négociation achats de ces 10 bonnes pratiques du droit international vaut pour les deux grandes typologies :

La négociation intégrative, par laquelle deux parties (acheteur et fournisseur) parviennent à une solution mutuellement acceptable, où chacun gagne quelque chose. Par exemple, le référencement d’un nouveau fournisseur.

La négociation distributive, qui vise à répartir une ressource fixe dans laquelle l’un gagne et l’autre perd, comme pour une négociation de renouvellement de tarif.

À noter que tout l’art du négociateur est de transformer une négociation distributive en négociation intégrative, par exemple, en obtenant une amélioration du service en échange d’une augmentation de prix.

Les 10 bonnes pratiques promues par la Harvard Law School donnent les outils nécessaires pour atteindre son objectif. Elles interviennent aux trois étapes de la négociation achats :

  • La préparation de la négociation ;
  • Le déroulement de la négociation ;
  • Le contrôle de l’exécution du contrat.

Les bonnes pratiques en amont de la discussion en négociation achats

Avant d’entamer la discussion, il convient de se préparer et de prendre un certain nombre de précautions préalables.

Définir votre « Meilleure Solution de Rechange »

La « Meilleure Solution de Rechange » (BATNA[1] en anglais) est une solution de repli, au cas où la négociation n’aboutisse pas.

L’idée est double :

  • Définir avant de commencer à discuter la limite au-delà de laquelle le deal ne présente pas d’avantage pour vous ;
  • Identifier une solution alternative pour ne jamais vous retrouver dos au mur.

Disposer de votre « Meilleure Solution de Rechange » vous permet ainsi d’aborder votre négociation achats avec le maximum de sérénité. Ainsi, vous êtes sûr de conclure un marché qui vous est profitable en fonction de la stratégie et de la politique de l’entreprise mise en place.

Convenir du processus de négociation

La fréquence des contacts, la composition des équipes ou le choix des lieux de réunion ont leur importance dans la qualité et l’efficacité des échanges lors d’une négociation achats.

Il convient de préciser ces points en amont pour s’assurer que l’acheteur et le fournisseur sont en phase. Cela n’a en réalité rien d’évident et nécessite souvent quelques ajustements préalables, notamment au sujet de la composition des équipes. Ce round autour du processus de négociation achats doit aussi être l’occasion pour vous de tester votre futur partenaire.

Établir un climat de confiance

Même si ce n’est pas toujours facile dans le contexte d’une négociation achats aux délais serrés, il est très utile de prendre quelques minutes dès le début pour faire mieux connaissance avec votre interlocuteur principal, fournisseur ou collaborateur. Faire connaissance, se découvrir une passion commune ou, a minima, avoir la volonté partagée de faire aboutir la négociation sont autant de moyens pour parvenir à un marché.

Si la négociation achats est prévue pour se dérouler uniquement par e-mail, il importe tout de même d’initier un premier contact téléphonique pour créer les meilleures conditions possible pour l’échange. Le plaisir partagé de réussir le deal fait partie de vos atouts !

Les bonnes pratiques pendant la négociation du marché

Au moment de négocier la signature d’un marché, plusieurs mesures sont à prendre en compte.

Pratiquer l’écoute active

Certains négociateurs ont parfois besoin de répéter leur présentation et de roder leurs arguments dans leur tête avant de prendre la parole. Le conseil de la Harvard Law School est de ne pas utiliser le temps d’intervention de vos interlocuteurs pour pratiquer cet exercice.

En effet, il est important d’écouter avec toute votre attention. Vous en tirerez trois bénéfices :

  • Placer votre interlocuteur dans les meilleures dispositions à votre égard et votre investissement dans l’échange sera perceptible ;
  • Vous mettre en capacité de reformuler point par point l’argumentaire de votre partenaire et vous assurer ainsi de votre parfaite compréhension ;
  • Enregistrer en pleine conscience une information donnée par votre interlocuteur qui pourra vous servir ensuite dans votre propre argumentation.

Poser les bonnes questions

Poser des questions ouvertes est une manière efficace de faire avancer dans le bon sens une négociation achats, à plus forte raison une négociation intégrative où toutes les options sont théoriquement ouvertes. N’hésitez pas à interroger votre futur partenaire sur ses projets, ses besoins, ses contraintes ou sa perception de l’avenir.

L’idée est de conduire votre interlocuteur à se dévoiler pour mieux comprendre ses enjeux véritables. Peut-être que son objectif prioritaire est de vous avoir comme référence. Cette information vous ouvre, par exemple, la possibilité de lui proposer un « témoignage client » pour un partage public — qui ne vous coûte rien — en échange d’un effort supplémentaire sur les délais ou d’une accélération de la dématérialisation des factures.

Avancer étape par étape

La gestion du temps est certainement une différence fondamentale entre négociation distributive et négociation intégrative. Si la première se déroule le plus souvent au cours d’un seul échange, la seconde peut se permettre une série de rounds.

Pour réussir votre négociation achats intégrative, avancez étape par étape ! Chaque prise de contact doit être l’occasion de se focaliser sur un aspect particulier des modalités de collaboration. Vous devez pouvoir dessiner petit à petit un accord où chaque partie fait un pas là où cela lui coûte le moins. Des solutions peuvent ainsi être trouvées pour satisfaire les deux parties.

Par exemple, si votre interlocuteur souhaite monter en compétence sur la logistique et faire de votre collaboration un laboratoire, il sera particulièrement ouvert à vos exigences en ce domaine. A contrario, si vous vous apprêtez à conclure une acquisition de périmètre, vous serez sans doute enclin à augmenter le volume de votre commande…

Se méfier du « biais d’ancrage »

Le programme de négociation de la Harvard Law School définit le « biais d’ancrage » comme l’influence du premier chiffre cité dans le déroulement d’une négociation, quand bien même l’élément chiffré annoncé d’emblée ne serait pas spécialement étayé. Là où un observateur tiers fixerait de bonne foi à 50 le point d’équilibre raisonnable, le biais induit qu’en annonçant dès le départ 30 lors de la conclusion d’un marché, une partie a davantage de chances d’obtenir 40.

Sur la base de ce concept, la recommandation du programme est d’annoncer le premier un élément chiffré de référence et d’utiliser ensuite les échanges pour conduire la négociation dans votre direction. Si votre interlocuteur connaît ce principe et prend la main sur l’ancrage, ayez d’autant plus en tête votre « Meilleure Solution de Rechange » pour éviter de vous faire entraîner là où vous ne souhaitez pas aller !

Présenter plusieurs offres simultanément

Plutôt que de faire une seule proposition par thématique, multipliez les offres ! Si vous évoquez les conditions de livraison, citez trois modalités différentes en faisant jouer les variables de fréquence, de points de livraison et de créneaux dans la journée, par exemple.

L’intérêt est de ne jamais vous retrouver dans une situation de blocage « à prendre ou à laisser », mais bien de construire avec votre partenaire la meilleure solution possible qui puisse convenir aux deux parties. Même si aucun marché n’est satisfaisant dès le début de la négociation, le fait de vous montrer ouvert conduit votre interlocuteur à faire l’effort de vous expliquer sur quelle base de votre proposition il serait prêt à conclure.

Les bonnes pratiques pour sécuriser l’avenir lors d’une recherche de collaboration

Une fois le marché passé et la collaboration entérinée, il reste encore quelques bonnes pratiques à appliquer afin de pérenniser le partenariat nouvellement conclu.

Négocier des clauses contraignantes

Une négociation achats est un pari sur l’avenir. Chaque partie prend des engagements qu’elle pense pouvoir tenir dans l’instant tout en sachant que le contexte — pour les deux parties — évolue dans une perspective dite « VUCA[2]». Les promesses peuvent se révéler plus difficiles ou plus coûteuses à tenir qu’initialement prévu.

Pour vous prémunir contre les mauvaises surprises, rendez l’abandon éventuel de ses engagements plus coûteux pour le fournisseur !

Des clauses contraignantes assorties de pénalités présentent deux avantages :

  • Quantifier la non-qualité et/ou les manquements au contrat ;
  • Induire des arbitrages en votre faveur de la part du fournisseur en cas de difficultés imprévues à exécuter la prestation.

Planifier des étapes d’évaluation dans l’organisation du partenariat

L’ultime bonne pratique en matière de négociation achats est de prévoir des moments — et souvent des instances — d’évaluation du parfait déroulement du contrat.

Dans un partenariat, il y a ce que l’on voit immédiatement (des retards de livraison) et ce que l’on discerne moins facilement (un décalage dans un programme d’innovation). Le principe est de valider entre égaux la bonne exécution de 100 % des clauses contractuelles et de se donner toutes les chances de détecter d’éventuels dérapages.

L’idée est de pouvoir traiter au plus vite les « causes racines » des dysfonctionnements éventuels pour rester dans l’esprit de la négociation initiale tout au long de l’exécution du contrat.

En conclusion, l’aboutissement réussi d’une négociation achats repose sur un savoir-faire comme sur un savoir-être. N’oubliez pas de définir votre « Meilleure Solution de Rechange » et méfiez-vous du biais d’ancrage ! Préparez la négociation avec soin, concentrez-vous sur les propos de vos interlocuteurs, gérez le temps à votre avantage et anticipez le déroulement et les dérapages possibles.

En vous appropriant ces 10 bonnes pratiques, vous améliorez votre profil de négociateur achats. Vous vous placez dans les meilleures conditions pour réévaluer votre portefeuille de fournisseurs (service ou produit). La relation avec certains acteurs clés est ainsi approfondie et l’intégration de nouveaux partenaires est facilitée.

Pour aller encore plus loin dans la rationalisation de votre panel, lisez le livre blanc « Rationalisez votre portefeuille fournisseurs ».


[1] Best Alternative To a Negociated Agreement

[2] Volatilité ; Incertitude (Uncertainty) ; Complexité ; Ambiguïté