Maîtriser le DPO (Days Payable Outstanding) pour optimiser la gestion des achats et la relation fournisseurs en entreprise

Days Payable Outstanding relation fournisseurs
16 octobre 2025

Le Days Payable Outstanding (DPO) est un indicateur financier essentiel à la bonne gestion des entreprises, à l’orientation de la stratégie et à la préservation de la santé financière. Plus qu’un simple chiffre, il éclaire la performance de la trésorerie, reflète la qualité des relations avec les fournisseurs et guide des décisions parfois complexes. Dans un cadre réglementaire européen de plus en plus rigoureux et face à des exigences croissantes de compétitivité, comprendre, calculer et piloter le DPO est une nécessité pour toute entreprise soucieuse d’optimiser ses ressources et de rester en phase avec les attentes de son écosystème.

Qu’est-ce que le Days Payable Outstanding (DPO) ?

Le Days Payable Outstanding est un ratio financier exprimant, en jours, le délai moyen que met une entreprise pour régler ses factures fournisseurs. C’est un indicateur stratégique à la fois pour la gestion des achats et pour la qualité des relations avec les partenaires commerciaux.

Cet indicateur fait partie intégrante du Cash Conversion Cycle (CCC), qui évalue la capacité d’une entreprise à convertir ses investissements en stocks en liquidités grâce aux ventes. Une maîtrise équilibrée du DPO contribue à optimiser le fonds de roulement et à garantir une gestion plus fluide des flux de trésorerie.

Le DPO est ainsi bien plus qu’un chiffre comptable : il se situe à la croisée des enjeux financiers et opérationnels. Il conditionne la disponibilité des liquidités, la capacité d’investissement et, dans certains cas, la réputation de l’entreprise auprès de ses fournisseurs.

Comment calculer le DPO ?

Pour piloter efficacement cet indicateur, il est indispensable de savoir le calculer correctement. La formule standard est la suivante :

DPO= Dettes fournisseurs × Nombre de jours / Coût des marchandises vendues (COGS)

  • Dettes fournisseurs : montant total des factures fournisseurs en attente de règlement.
  • Nombre de jours : période d’analyse, généralement 365 jours pour une année complète.
  • COGS (Cost Of Goods Sold) : coût des marchandises vendues sur la même période.

     

Exemple pratique :
Si une entreprise présente 500 000 € de dettes fournisseurs sur l’année et un COGS de 3 000 000 €, le calcul du DPO sera :

DPO = 500 000×365 / 3 000 000 = 60,8 jours

L’entreprise met donc en moyenne 60,8 jours pour régler ses fournisseurs.

Interprétation du DPO : que signifie un DPO élevé ou faible ?

Avant d’agir sur le DPO, il est judicieux d’en comprendre les implications. Cet indicateur doit être interprété en fonction de la stratégie de l’entreprise et des normes de son secteur d’activité.

DPO élevé

Un DPO élevé signifie que l’entreprise conserve plus longtemps ses liquidités avant de payer ses fournisseurs.

Avantages :

  • Amélioration de la trésorerie disponible.
  • Meilleure optimisation du fonds de roulement.

Inconvénients :

  • Risque de détériorer les relations avec les fournisseurs.
  • Possibles pénalités financières ou ruptures de contrats.

 

DPO faible

Un DPO faible reflète des paiements plus rapides.

Avantages :

  • Renforcement de la confiance et des relations commerciales.
  • Possibilité d’obtenir de meilleures conditions (remises, priorité d’approvisionnement).

Inconvénients :

  • Trésorerie moins optimisée.
  • Moins de flexibilité financière en cas de besoins imprévus.

 

Pourquoi comparer le DPO aux normes sectorielles ?

Chaque secteur a ses propres standards en matière de délais de paiement, souvent dictés par les pratiques commerciales ou la réglementation. Un écart significatif par rapport à la moyenne du secteur peut révéler des marges d’amélioration ou signaler un déséquilibre. Il est donc recommandé de comparer régulièrement son DPO avec les benchmarks sectoriels pour ajuster la stratégie.

Comparaison sectorielle

Voici un aperçu des DPO moyens observés par secteur d’activité et leur interprétation :

Secteur d’activité

DPO moyen (en jours)

Analyse comparative

Industrie manufacturière

60

Standard du secteur, optimisation élevée

Distribution

45

Délai plus court, relations privilégiées

Services

35

Paiement rapide, trésorerie moins optimisée

Étude de cas :
Dans le secteur industriel, les marges peuvent être fortement contraintes par les coûts des matières premières, l’énergie, la logistique et les investissements en équipements. Pour préserver leur trésorerie et financer ces besoins lourds, de nombreuses entreprises industrielles adoptent des stratégies visant à allonger le délai moyen de paiement des fournisseurs, autrement dit à augmenter leur DPO.

Une entreprise européenne spécialisée dans la fabrication de composants automobiles, réalisant un chiffre d’affaires annuel de 150 millions d’euros. Historiquement, son DPO s’établissait à 60 jours, en ligne avec la moyenne du secteur manufacturier. Toutefois, sous la pression d’une hausse des coûts des matières premières et d’une baisse de ses liquidités, la direction financière décide d’augmenter progressivement son DPO à 75 jours.

Cette stratégie permet à l’entreprise de conserver plusieurs millions d’euros de trésorerie supplémentaire, qui sont réinjectés dans la production et le développement de nouveaux produits. À court terme, l’effet positif sur le fonds de roulement est indéniable : l’entreprise évite de recourir à des financements bancaires coûteux et améliore son autonomie financière.

Mais cette décision n’est pas sans conséquences : certains fournisseurs stratégiques, notamment des PME locales, expriment rapidement des tensions, expliquant que ces délais prolongés fragilisent leur propre trésorerie. L’entreprise constate alors une baisse de la qualité des approvisionnements chez deux fournisseurs critiques, ainsi qu’un retard dans certaines livraisons. Ces incidents entraînent à leur tour des perturbations dans la chaîne de production et des pénalités pour non-respect des délais auprès de ses propres clients.

Après analyse, la direction des achats et la direction générale décident d’engager un dialogue avec les fournisseurs clés. Un plan d’action est mis en place pour revenir à un DPO moyen de 65 jours pour les partenaires les plus stratégiques, tout en maintenant un DPO plus élevé (75 jours) pour les fournisseurs non critiques ou disposant d’une plus grande solidité financière. En parallèle, la digitalisation de la comptabilité fournisseurs est accélérée pour réduire les coûts administratifs et sécuriser les flux.

Cette étude de cas illustre bien les arbitrages que doivent faire les décideurs entre optimisation de la trésorerie et maintien d’une chaîne d’approvisionnement fiable. La gestion du DPO ne peut se résumer à une approche unilatérale : elle nécessite une analyse fine du portefeuille fournisseurs, en tenant compte de leur importance stratégique, de leur solidité financière et des pratiques sectorielles. Un excès d’optimisation peut mettre en péril la qualité des relations et la résilience globale de l’entreprise.

Stratégies pour optimiser le DPO

Optimiser le DPO ne consiste pas à le maximiser coûte que coûte, mais à trouver le juste équilibre entre trésorerie et relations fournisseurs. Plusieurs leviers peuvent être actionnés.

1. Négocier les conditions de paiement

Il est possible d’obtenir des délais plus favorables lors des négociations contractuelles, à condition de maintenir un dialogue transparent et de préserver la confiance mutuelle.

2. Automatiser les processus comptables

La digitalisation des processus comptables permet de réduire les erreurs, d’accélérer le traitement des factures et d’améliorer la visibilité sur les échéances.

3. Suivre les paiements de façon proactive

Les outils numériques de suivi facilitent la gestion des échéances et permettent de détecter rapidement les écarts.

4. Trouver l’équilibre

Une gestion fine du DPO passe par une analyse continue des indicateurs financiers et des retours fournisseurs. Cet équilibre contribue à la productivité, réduit les coûts et renforce les partenariats stratégiques.

Encadré : “Les coûts de gestion fournisseurs s’élèvent en moyenne à 1 000 € par fournisseur et par an, tandis que les coûts transactionnels varient entre 19 € et 95 € par transaction, en fonction du niveau de digitalisation. Il ajoute qu’au-delà de ces économies, ces mesures contribuent à améliorer la productivité des équipes et à renforcer le partenariat stratégique.” – Quentin Burès, Responsable optimisation et digitalisation des achats, Manutan[1]

DPO dans le contexte européen

La gestion du DPO ne peut s’affranchir des cadres réglementaires européens ni des pratiques locales. Les entreprises doivent composer avec ces contraintes pour rester compétitives et éviter les sanctions.

Impact des réglementations européennes

Les directives européennes fixent des délais maximums (souvent 60 jours) afin de lutter contre les retards de paiement et protéger les fournisseurs, en particulier les PME.

Comparaison entre pays

Les pratiques varient sensiblement : en Allemagne, les délais de paiement sont généralement plus courts qu’en France ou en Italie, reflétant des cultures de cash management différentes.

Considérations fiscales et comptables

Les spécificités locales, qu’il s’agisse de règles fiscales, comptables ou sociales, doivent être intégrées dans la stratégie DPO pour garantir la conformité et renforcer la compétitivité.

Encadré : « Des travaux de recherche ont montré que l’existence de retards de règlement des clients augmente la probabilité de défaillance du fournisseur de 25 %, et même de 40 % lorsque ces retards dépassent 30 jours. La lutte contre les retards de paiement demeure donc un enjeu essentiel de compétitivité et de survie pour les entreprises. » – Thierry Millon, Directeur des études, Altares[2]

Le Days Payable Outstanding est un levier puissant pour piloter la trésorerie, améliorer la gestion des achats et entretenir des relations fournisseurs équilibrées. Une approche maîtrisée et adaptée à votre secteur et votre contexte géographique permet de transformer cet indicateur en véritable atout stratégique.

 

[1] Quentin, BURÈS (Responsable optimisation et digitalisation des achats, Manutan)

[2] Thierry, MILLON (Directeur des études, Altares), Comportements de paiement  des structures publiques et privées en France et en Europe, Publication du 01 septembre 2024, [chrome-extension://efaidnbmnnnibpcajpcglclefindmkaj/https://altares87872.activehosted.com/content/pyND2/2024/09/16/c843c837-eda6-4fa7-9f69-fde8237fdb3a.pdf?s=153ff4b87dc1bcfd38d78ce2d2a79008&nl=10&c=98&m=111]

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